Catéchèses

Quand le Fils de l’homme viendra

Quand le Fils de l’homme viendra dans sa gloire, avec tous ses saints anges (οἱ ἅγιοι ἄγγελοι μετ’ αὐτοῦ), il s’assoira sur son siège de roi tout-puissant. On rassemblera tous les peuples (πάντα τὰ ἔθνη) devant lui. Et il séparera (αφοριεί) les gens les uns des autres, comme le berger sépare les brebis (τὰ πρόβατα ; πρόβατον ; genre neutre) des boucs (ερίφων ; ἔριφος ; genre masculin). Il placera les brebis à sa droite et les boucs à sa gauche.

Alors le roi dira à ceux qui sont à sa droite : Venez, vous que mon Père bénit. Héritez (κληρονομήσατε ; κληρονομέω) le Royaume que Dieu vous a préparé depuis la création du monde. En effet, j’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger. J’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire. J’étais un étranger, et vous m’avez accueilli. J’étais nu, et vous m’avez vêtu. J’étais malade, et vous m’avez visité. J’étais en prison, et vous êtes venus me voir. Alors les justes (οἱ δίκαιοι ; δίκαιος) diront au roi : Seigneur, quand est-ce que nous t’avons vu avoir faim, et que nous t’avons nourri, ou avoir soif, et que nous t’avons donné à boire ? et quand est-ce que nous t’avons vu étranger, et que nous t’avons recueilli ; ou nu, et que nous t’avons vêtu ? et quand est-ce que nous t’avons vu malade, ou en prison, et que nous sommes venus vers toi ? Et le Roi répondant, leur dira : En vérité, je vous le dis, toutes les fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, vous me l’avez fait à moi-même.

Ensuite, le roi dira à ceux qui sont à sa gauche : Allez-vous-en loin de moi, maudits ! Allez dans le feu éternel (τὸ πῦρ τὸ αἰώνιον) qu’on a préparé pour le diable (τῷ διαβόλῳ) et pour ses anges (καὶ τοῖς ἀγγέλοις αὐτοῦ) ! Car j’ai eu faim, et vous ne m’avez pas donné à manger ; j’ai eu soif, et vous ne m’avez pas donné à boire ; j’étais étranger, et vous ne m’avez pas recueilli ; nu, et vous ne m’avez pas vêtu ; malade et en prison, et vous ne m’avez pas visité. Alors eux aussi répondront disant : Seigneur, quand est-ce que nous t’avons vu avoir faim, ou avoir soif, ou être étranger, ou nu, ou malade, ou en prison, et que nous ne t’avons pas servi ? (καὶ οὐ διηκονήσαμέν σοι ; διακονέω) ? Alors il leur répondra disant : En vérité je vous le dis, toutes les fois que vous ne l’avez pas fait à l’un de ces plus petits, vous ne l’avez pas non plus fait à moi. Et ceux-ci s’en iront au châtiment éternel, mais les justes à la vie éternelle (οἱ δὲ δίκαιοι εἰς ζωὴν αἰώνιον).

(Matthieu 25, 31-46 ; d’après https://lire.la-bible.net/lecture/matthieu/25/1 et https://theotex.org/ntgf/matthieu/matthieu_25_gf.html)

Une prophétie

Chers frères et sœurs en Christ,

Quelques jours avant la Passion du Seigneur Jésus, à Jérusalem, ses disciples lui ont dit : « Voilà, maintenant tu parles clairement, sans utiliser d’images (ou paraboles, παροιμίαν ; παροιμία) ! » (Jean 16, 29). Le texte que nous venons d’entendre, du 25ème chapitre de l’évangile selon Saint Mathieu, mentionne des paroles du Seigneur prononcées dans cette période. Saint Jean Chrysostome remarque que ce texte n’est pas introduit, comme ailleurs chez l’évangéliste Matthieu, par les paroles « le Royaume des cieux ressemble à ceci » (Matthieu 18, 23 ; 22, 2). Il ne s’agit donc pas d’une parabole, mais d’une prophétie qui décrit comment ce sera « Quand le Fils de l’homme viendra dans sa gloire ».

Un évènement cosmique

L’évènement est cosmique, car le Seigneur nous dit que tous ses saints anges seront ressemblés ainsi que tous les peuples, c’est-à-dire tous les humains de tous les temps. Indiquer la présence de tous les peuples, c’est-à-dire ne se résumant pas aux peuples d’un certain endroit ou d’une certaine époque, témoigne de la résurrection des morts.

Une sévère séparation

Le roi séparera (αφοριεί) les gens, comme le berger sépare les brebis des boucs. Ce n’est pas les anges ou d’autres gens qui feront cette séparation, mais le roi lui-même. Les différences entre brebis et boucs nous enseignent les critères de cette séparation : contrairement aux boucs, les brebis suivent la voix du berger et lui fournissent beaucoup de choses : la laine, le lait et les agneaux. Cette différence entre les boucs sans utilité et les brebis productives se fait par la nature de ces animaux. En revanche, les hommes sont productifs ou non par leur propre volonté et c’est pour cela que certains sont condamnés et d’autres sont couronnés.

Une antithèse

Le sort des brebis et des boucs est en opposition, mais cette opposition n’est pas l’œuvre de Dieu. Ainsi les brebis sont appelées « vous qui êtes bénis de mon Père » alors que les boucs sont appelés simplement « maudits » sans préciser par qui. Puisqu’il n’est pas écrit qu’ils soient maudits ni par le Père ni par le Roi, des exégètes ont déduit qu’ils se sont maudits eux-mêmes par leurs propres méfaits. Pareillement, s’il est écrit que les justes sont appelés à hériter le Royaume qui leur « est préparé depuis la création du monde », les maudits iront dans « dans le feu éternel préparé pour le diable et pour ses anges », c’est-à-dire dans un endroit qui ne leur a pas été destiné mais où ils se sont dirigés eux-mêmes en suivant le diable et ses anges.

Un héritage

La première partie est dédiée aux brebis qui sont appelées « vous que mon Père bénit » –textuellement : « les bénis de mon Père ». Ceux-ci sont appelés à hériter (κληρονομήσατε ; κληρονομέω), ce qui n’est pas propre aux étrangers ou aux serviteurs, mais qui est propre aux enfants qui héritent des biens de leurs parents. Il y a donc un lien de parenté qui est créé entre le Roi de gloire, son Père et les justes qui héritent, comme des enfants, du Royaume de Dieu qui leur a été préparé depuis la création du monde.

Une terrible malédiction

La deuxième partie de l’enseignement concerne les boucs. Ce ne sont pas nécessairement des criminels, car aucun péché considéré grave ne leur est reproché. Ce sont des gens dont le seul défaut est de n’avoir pratiqué le bien d’aucune manière. Cela ne veut pas dire que les crimes divers et variés sont sans importance, mais que la pénitence est, en essence, un retournement du mal vers le bien, comme dit le psalmiste : « Détourne-toi du mal, et fais le bien ; recherche la paix et poursuis-la » (Psaume 33, 15). Malheureusement les boucs sont dépourvus de tout bienfait, ils n’ont fait le bien d’aucune manière car il n’est pas écrit qu’ils aient fait un bien et délaissé un autre. Ne pas faire le mal n’est pas suffisant, car Dieu veut que nous pratiquions le bien et surtout la miséricorde : « Soyez miséricordieux, comme votre Père est miséricordieux » (Luc 6, 36).

Une grande hypocrisie

La réponse que les boucs font au roi se distingue de celle des brebis car ils déclarent avoir bien voulu servir (διακονέω) le roi personnellement s’ils avaient pu le rencontrer. Au contraire, les brebis ne savent pas parler du service (διακονία) mais ils héritent le royaume comme des enfants alors que les boucs qui, avec un langage plus exquis, savent prêcher le service, iront aux châtiments. Le salut n’est donc pas dans les apparences, dans l’expression ou la communication, mais dans les bienfaits accomplis avec humilité.

Une grande simplicité

Le bien que Dieu attend de nous n’est pas quelque chose spectaculaire ou difficile à faire, car l’accusation n’est pas « j’étais malade et vous ne m’avez pas guéri » ou « j’étais prisonnier et vous ne m’avez pas libéré ». Donner à manger, accueillir ou vêtir son prochain suppose d’avoir les biens nécessaires mais il ne s’agit pas d’avoir beaucoup, car le Roi de gloire ne demande pas d’être servi comme un Roi, mais comme un pauvre mendiant. Il n’est pas question des plats gastronomiques, de confort ou des vêtements précieux, mais du strict nécessaire. Donner à boire ne nécessite pas d’être riche et visiter les prisonniers ou les malades ne demande pas nécessairement des richesses matérielles mais uniquement du temps.

Une conclusion

Pour conclure les enseignements de cette prophétie, nous pouvons citer une des apophtegmes de Saint Antoine le Grand « Du prochain vient la vie ou la mort. En effet, si nous gagnons notre frère, nous gagnons Dieu ; mais si nous scandalisons notre frère, nous pêchons contre le Christ. » (Antoine 9, Les Sentences des Pères du désert, collection alphabétique, traduite et présentée par Dom Lucien Regnault, Solesmes, 1981, p. 15)

P. Catalin Adrian

(Homélie prononcée le 21 janvier 2023 à l’Eglise Protestante Unie de Saint Quentin en Yvelines)

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